L'interrogation des âmes sur l'origine de leur Khalifa
Aujourd'hui , je vous invite à un voyage intérieur, car il ne faut pas l'oublier, nous sommes des âmes bien plus que des corps...et notre réalité se situe ailleurs que sur la Terre.
Il n'y a pas meilleur "guide" qu'Ibn Arabi pour nous accompagner.
L'interrogation des âmes sur l'origine de leur Khalifa |
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Venons-en maintenant au sujet qu'il convient d'annexer au présent chapitre. Nous déclarons donc : lorsque DIEU eut chargé les âmes humaines individuelles de gouverner ce corps physique et qu'Il les eut préposées au Khalifa de celui-ci, leur montrant à l'évidence que de ce corps elles étaient le Khalife, les âmes constatèrent alors qu'elles-mêmes relevaient d'un Sujet existentiateur qui les avait investies du Khalifa. Et ceci les détermina à s’enquérir de celui qui les avait préposées à cette charge afin de le connaître. Était-il de leur espèce ? Ou s'y apparent-il par l'effet de quelque ressemblance ? Ou bien ne leur ressemblait-il pas ? Alors les âmes se mirent en quête, afin de connaître celui-ci par elles-mêmes.
La rencontre de l'Envoyé et son message à l'adresse des âmes.
Et comme elles étaient dans cette situation, en train de rechercher la voie susceptible de les conduire jusqu'à Lui, voici qu'elles rencontrèrent parmi les âmes individuelles un "personnage" (shaykh) qui les avait déjà précédées dans l'existence. Aussitôt, les âmes se lièrent d'amitié avec lui à cause de leur ressemblance, et elles lui déclarèrent : " Tu nous as précédées dans ce séjour ( l'existence terrestre). T'est-il arrivé ce qui nous est arrivé ?" Il leur demanda : " Que vous est-il donc arrivé ?" Elles répondirent : " de chercher à connaître Celui qui nous préposées comme Khalifes pour gouverner ce temple (de chair)". Il leur dit alors : " De cela je possède une Connaissance certaine que je vous apporte de la part de Celui qui vous a investies du Khalifa. Il m'a envoyé comme Prophète vers ceux de mon espèce pour que je leur montre en toute clarté la Voie de la Connaissance menant jusqu'à Lui et dans laquelle ils trouveront le Bonheur".
Deux candidats d'entre les âmes veulent être initiés et se présentent devant le Prophète
Le premier candidat (à se présenter devant l'Envoyé) lui répond : " C'est Lui que je cherche, aussi fais-moi connaître cette voie afin que je puisse m'y engager". L'autre lui déclare : " Il n'y a point de différence entre moi et toi, et je veux découvrir par moi moi-même la voie qui me permettra de Le connaître. Je refuse à t'imiter en cette affaire. Car si tu es parvenu là où tu en es, et si tu y es arrivé grâce au raisonnement dont je possède également la faculté, pourquoi serai-je assez peu résolu pour m'en remettre à toi. Mais si tu as obtenu cela en vertu d'un privilège exclusif, tout comme nous-même avons obtenu le privilège de l'existence après n'avoir point existé, voilà encore une affirmation dénuée de preuve".
Caractérisation des personnages : le théoricien réfractaire et l'adepte du Prophète.
Ce dernier ne prête pas attention au propos du Personnage, et il se met à réfléchir et à examiner cette affaire avec sa raison. C'est la situation dans laquelle se place celui qui aborde la Connaissance à l'aide des évidences rationnelles, en scrutant les choses par la réflexion théorique. L'autre candidat typifie les " adeptes du Prophète" et ceux et ceux qui se conforment à lui relativement à la Connaissance qu'il leur communique au sujet de leur Divin Démiurge. Enfin, ce " personnage" que nos deux hommes suivent par des démarches contraires typifie le Prophète qui instruit.
Or, la Loi Divine que prescrit cet Instructeur (Mu'allim) indique clairement la Voie conduisant jusqu'au " Rang de la Perfection et du Bonheur", comme le sous-entend le raisonnement que tient l'un des deux individus en train de méditer l'affaire de cet Instructeur, à savoir celui qui refuse de le suivre.
En effet, il ne peut tomber d'accord avec l'Instructeur, si ce n'est dans la mésure qu'implique l'ordre naturel en fait d' " incompatibilité de caractère" ( ou de nature,). Il n'y a d'incompatibilité de caractère radicale qu'en raison d'une mesure particulière et d'une proportion bien déterminée. C' est pourquoi on nomme cela " alchimie ", parce qu'elle introduit la proportion et la juste mesure.
Lorsque notre individu a constaté ce fait, il s'en félicite car il pense s'être affranchi de l'Instructeur sans avoir dû s'y conformer. Il se croit supérieur à son malheureux compagnon qui lui, s'y conforme docilement. Alors il fait bande à part. Quant à l'imitateur zélé, il reste ferme sur sa position en se conformant scrupuleusement à l'Instructeur, et il prend ainsi l'avantage sur l'indépendant, celui là même qui, ayant remarqué l'entente naturelle ( de son confrère avec l'Instructeur), se garde bien de l'imiter et s'en tient à l'écart dans l'expectative, précisément pour cette raison.
Les deux pèlerins accomplissent les rites religieux et se préparent en vue du mi'râj.
Ensuite, nos deux hommes ou nos deux personnages -- en l’occurrence il peut s'agir de deux femmes, ou l'un des deux peut être une femme --, ces deux-là se mettent donc en route, l'un en tant qu'observateur théorique ( du Maître ), l'autre en tant que son imitateur scrupuleux. Afin de corriger leurs moeurs et de combattre leurs penchants corporels, comme la faim et les servitudes liées à l'activité du corps, les voilà qui se lancent dans les pratiques religieuses telles que la longue station debout et la persévérance durant la prière, le jeûne, le pèlerinage à la Mecque, le guerre sainte, la vie errante. L'un s'en acquitte par l'observance théorique, l'autre en pratiquant ce que lui a prescrit son guide et maître dénommé le " Législateur " (cheikh).
Premier ciel : Adam et la lune
L'adepte est reçu par Adam, le théoricien par l'entité spirituelle de la lune. Déception du théoricien évincé des connaissances d'Adam.
Lorsqu'enfin ils en ont terminé avec les exigences du règne de la nature élémentaire, les deux hommes n'empruntant plus désormais à celle-ci que le strict nécessaire à la conservation du corps - de ce corps pour l'existence, l'équilibre et la préservation duquel ils obtinrent cette âme individuelle dont la vocation est de rechercher la Connaissance de DIEU, et que DIEU préposa tout spécialement au Khalifa du corps - alors nos pèlerins émergent de l' "empire des passions" inhérent à la nature élémentaire, et voici que la Porte du Ciel de ce monde s'ouvre devant eux. Le disciple (de l'Instructeur) est accueilli par Adam qui lui souhaite la bienvenue et l'installe à ses côtés. Le théoricien indépendant est reçu par l'entité spirituelle (rûhânîya) de la lune qui l’installe chez elle. Aussitôt, le théoricien qui est l'hôte de la lune voit qu'elle est se trouve au service d' Adam, comme le vizir auquel DIEU a ordonné de lui être soumis. Il voit accumulée auprès de la lune une profusion de sciences, mais dont le domaine est restreint aux contrées situées au-dessous d'elle, et il constate que la lune n'a nulle connaissance de ce qui la surplombe, car de cela il ne reste qu'une faible trace dans les régions sous-jacentes. Il remarque alors qu'auprès d' Adam réside une connaissance de ce qui est au-dessous de la lune, ainsi qu'une connaissance des localités supérieures placées au dessus d'elle. Et le théoricien voit Adam en train de communiquer à son hôte (l'adepte) le savoir qu'il possède, et que la lune est incapable de lui révéler, à lui. De plus, il apprend qu' Adam n'a accueilli l'adepte que grâce à l'intercession de cet Instructeur qui est le Prophète. Aussitôt, le théoricien s'attriste profondément et il se repent de n'avoir pas voulu suivre la voie que ce Prophète lui montrait. Il se met à croire en lui et se dit que s'il revient du présent voyage, il lui faudra nécessairement suivre ce Prophète, et pour cela, entreprendre un nouveau voyage.
Adam enseigne à l'adepte les Noms Divins et l' " aspect Divin particulier" qui est l' " Élixir des gnostiques".
Quant à l'adepte, cet hôte d'Adam, son bon "père" lui enseigne les Noms Divins selon l'exacte mesure qu'il le voit capable de supporter de par sa complexion naturelle. En effet, la constitution corporelle élémentaire marque de son empreinte les âmes (humaines) individuelles, or toutes ne se situent pas à un seul niveau lorsqu 'elles reçoivent les connaissances. Telle âme reçoit ce que ne peut recevoir telle autre. En ce premier ciel, l'adepte est instruit par Adam sur l' "aspect Divin particulier" qui est propre à tout existant autre que DIEU et le dissimule à la connaissance tout en étant la raison et la cause de ce qu'Il devient concevable (par l'homme). Le théoricien ne peut pas connaître cet aspect Divin en principe. La connaissance d'un tel aspect, c'est la Science de l’Élixir en Alchimie naturelle. Il s'agit de l' "Élixir des Gnostiques", et je n'ai rencontré personne qui en soit instruit excepté moi-même. Au reste, si je n'avais pas reçu l'ordre d'aviser ce peuple - ou plutôt les serviteurs de DIEU - je me garderais bien d'en parler.
Les sciences spirituelles et naturelles émanant du premier Ciel.
Puis donc, nos deux pèlerins apprennent ce qui revient à cette (première) sphère concernant le pouvoir que DIEU lui a assignée afin qu'elle gouverne les quatre éléments de la Nature et les génitures terrestres. Ils apprennent ce que DIEU a révélé en ce ciel concernant l'ordre qui lui est particulier, selon la parole Divine : " Il a révélé en chaque ciel son ordre propre" (coran 41. 12). Mais le théoricien, étant l'hôte de la lune, n'apprend de cela que ce qui a trait aux influx physiques et aux transformations que subissent les corps composés relevant de la nature élémentaire. L'adepte lui, a le privilège de connaitre ce qui dans ce ciel relève de la Science Divine octroyée aux âmes individuelles : quelle est la relation de l' Être Divin à l'égard de celle-ci, quelles formes appartenant à la sphère de la lune sont imprimées dans les âmes, à partir d'où cette constitution humaine fut seule jugée apte au Khalifa, et nommément Adam qui en reçut l'investiture, lui et le maître de ce ciel. En outre, l'adepte réalise quelle forme est appelée à revêtir le Khalifa de la Science Divine, tandis que le théoricien réalise le Khalifa de la nature élémentaire qui détermine l'agencement des corps physiques, ainsi que les causes efficientes de la croissance parmi les corps qui subissent ces effets.
Le mi'râj comparé à l'état de rêve et les angoisses du théoricien.
Tout ce qu'obtient le théoricien, l'adepte l'obtient également, mais tout ce qu'obtient l'adepte, le théoricien ne peut l'obtenir. Alors son désarroi augmente, il accumule tristesse sur tristesse. Et lorsque son voyage ayant pris fin, il réintégrera son corps, il ne pourra l'admettre pour vrai. C'est que, durant ce voyage, notre homme se trouve comme le dormeur qui rêve pendant son sommeil. Sachant pertinemment qu'il a dormi, il se dit : " cela n'est pas vrai !" lorsqu'il se réveille pour reprendre ses activités, et le voilà délivré de son anxiété. En fait, il est tenaillé par l'angoisse à l'idée que ce qui lui est arrivé dans son voyage (rêve) s'empare de lui pour de bon. Après quoi, le malheureux est incapable de progresser plus avant, et c'est précisément ce qui le tourmente. Il n'en va pas de même pour l'adepte, car ce dernier contemple cette progression (ou ascension mentale) en y adhérant intimement, puisqu'il l'expérimente sous cet " aspect particulier" que seul connaît celui qui l'éprouve personnellement.
Le septième " Substitut Divin " et l'embryogenèse humaine.
En ce premier ciel se trouve le septième " Substitut Divin" chargé de veiller sur la goutte de sperme en gestation dans les matrices, où cette constitution humaine est destinée à apparaître. Il y veille au cours du septième mois qui suit la chute de la semence dans l’utérus. Durant ce mois, le bébé est au stade du foetus. Il se développe et grandit dans le sein de sa mère pendant la croissance de la lune, il dépérit et sa gestation dans le ventre maternel diminue pendant la phase décroissante de la lune. C'est là un signe, car si l'enfant naît au cours de ce septième mois, il n'a pas assez de force pour survivre comme celui qui naît au cours du neuvième mois.
Après avoir séjourné dans ce ciel autant qu'il plaît à DIEU, ils reprennent leur voyage, chacun des deux prend congé de son hôte et ils gravissent l' "échelle des esprits" jusqu'au deuxième ciel.
Deuxième ciel : Jésus, Jean-Baptiste et Mercure
Réception des pèlerins en ce ciel et discours de Mercure à l'adresse du théoricien.
Lorsqu'ils frappent au deuxième ciel, celui-ci s'ouvre et ils y accèdent. L'adepte fait halte chez Jésus - la paix soit sur lui - auprès duquel, se trouve Jean-Baptiste, " fils de sa tante ". Le théoricien descend chez Mercure. Après l'avoir accueilli et gracieusement installé en sa demeure, Mercure s'excuse auprès de lui et lui déclare : " Ne me retiens pas plus longtemps, car je suis au service de Jésus et de Jean-Baptiste. Voici que ton compagnon de voyage (l'adepte) est descendu chez eux, aussi dois-je me tenir à leur disposition pour savoir ce qu'ils m'ordonnent de faire au sujet de leur hôte. Lorsque j'en aurai terminé avec lui, je reviendrai vers toi". Alors le théoricien s'attriste encore plus profondément et regrette fort de n'avoir pas suivi la voie de son compagnon ni embrassé sa doctrine.
Réception des pèlerins en ce ciel et discours de Mercure à l'adresse du théoricien.
Lorsqu'ils frappent au deuxième ciel, celui-ci s'ouvre et ils y accèdent. L'adepte fait halte chez Jésus - la paix soit sur lui - auprès duquel, se trouve Jean-Baptiste, " fils de sa tante ". Le théoricien descend chez Mercure. Après l'avoir accueilli et gracieusement installé en sa demeure, Mercure s'excuse auprès de lui et lui déclare : " Ne me retiens pas plus longtemps, car je suis au service de Jésus et de Jean-Baptiste. Voici que ton compagnon de voyage (l'adepte) est descendu chez eux, aussi dois-je me tenir à leur disposition pour savoir ce qu'ils m'ordonnent de faire au sujet de leur hôte. Lorsque j'en aurai terminé avec lui, je reviendrai vers toi". Alors le théoricien s'attriste encore plus profondément et regrette fort de n'avoir pas suivi la voie de son compagnon ni embrassé sa doctrine.
A suivre ...
Source : l'Alchimie du Bonheur parfait - Ibn Arabi
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