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02 novembre 2018

Le déroulement du “festival” de Samain



Le “festival” de Samain était plein de joie et de lumière et l'abondance de nourriture et de boissons après les récoltes préparait la société aux rigueurs hivernales.


Samain signifie “réunion” et représentait le “festival” total mobilisant toute la population, aussi bien les vivants que les morts du “síd”. Il réclamait la participation de tous les êtres répartis en trois classes sociales:
Sacerdotale (druides) associée à la couleur blanche;
Guerrière (noblesse militaire) caractérisée par la couleur rouge;
Productrice (artisans et agriculteurs) mise en relation avec le bleu, le vert et le jaune.

Notons tout de suite que la couleur orange, si caractéristique d'Halloween, résulte d'un mélange de rouge et de jaune. Autrement dit, elle associe les couleurs des seules classes guerrière et productrice qui se distinguent de la classe sacerdotale dont la couleur blanche englobe toutes les couleurs et par conséquent toutes les classes. En effet, la fonction religieuse était interdite aux classes guerrière et productrice. Par contre, les fonctions guerrière et productrice étaient accessibles aux membres de la classe sacerdotale. Cela nous montre déjà qu'Halloween a surtout retenu, de ses lointaines origines, les aspects temporels plutôt que spirituels.

Chacune de ces classes remplissait un rôle précis:
La classe sacerdotale allumait le feu, pratiquait la divination et les sacrifices et présidait aux assemblées auxquelles le roi et les nobles prenaient part;
La noblesse guerrière participait largement aux banquets, festins et beuveries, aspect le plus visible du “festival”;
La classe productrice rendait hommage à ses idoles avant de participer à sa part du festin et d'assister aux jeux.

Dans les temps reculés, les réunions autour de la fête d'Halloween étaient l'occasion de pratiques divinatoires, voire magiques, de toutes sortes particulièrement importantes à l'orée de la saison froide.

Le feu n'intervenait dans les rituels de deux des quatre “festivals” celtiques, à savoir les deux “festivals” solsticiaux: Samain (1er novembre) et Beltaine (1er mai) qui marquaient respectivement le début et la fin de la saison froide.

Selon les usages de la fête d'Halloween, les gens allument des feux de joie et admirent les feux d'artifice. Toutefois, la coutume la plus répandue consiste à se promener avec une lanterne, éclairée de l'intérieur par une bougie.

Les maisons sont décorées de citrouilles et de navets creusés en forme de faces effrayantes ou bon enfant, également éclairées de l'intérieur par une bougie. Ils sont sensés représenter des êtres d'un autre monde.

Seuls les druides étaient maîtres des éléments, c'est-à-dire du feu, de l'eau et de la terre. L'eau jouait le rôle du miroir dans les pratiques traditionnelles de magie. Elle tenait aussi lieu de voie de passage entre le monde des vivants et celui des morts. Cette traversée correspondait au passage à travers le miroir.


Le passage d'un monde à l'autre

Le monde des vivants et le monde des morts sont des univers parallèles qui se côtoient en permanence sans se rencontrer sauf pendant le “festival” de Samain. La période d'échanges entre les deux mondes s'ouvre à la fois sur l'éternité du côté du “síd” et sur l'instant bref du côté du monde des vivants. En effet, l'instant du monde temporel, un temps suspendu sans passé ni avenir, représente ce qui se rapproche le plus ou s'éloigne le moins de l'éternité du monde atemporel. Bien que l'éternité et le temps soient sans commune mesure, ils n'en sont pas moins complémentaires. Sans cette coupure du temps, aucune porte ne s'ouvrirait sur l'éternité. D'où, la brièveté des voyages dans le “síd”.

Ce moment n'est pas sans rapport avec la coutume d'Halloween où adultes et enfants se déguisent en créatures d'un autre monde (spectres, fantômes, vampires, zombies, sorcières ou lutins) avec le secret espoir de surprendre ou d'effrayer leurs amis. Cet instant de rencontre, cette seconde de frayeur qui coupe l'être de ses repères, n'est-il pas un lointain écho du bref moment d'ouverture sur l'éternel ?


À noter que la conception du voyage vers le “síd” est diamétralement opposée à celle du voyage vers le Paradis terrestre du monde chrétien. Là le temps, peuplé d'anges et de démons, s'étire indéfiniment.



La pomme


Entrer dans l'Autre Monde n'est pas offert à tout le monde. C'est un privilège réservé aux héros et à quelques rares élus. Une messagère du “síd” leur donne une pomme et les emmène par delà la mer dans une barque de cristal ou de verre.

La pomme est le fruit de l'immortalité, de la connaissance et de la sagesse. Elle partage cette qualité avec deux autres fruits, la noix et le gland. Rien à voir avec la pomme biblique dont la consommation contraint l'Éternel à chasser Adam et Ève du Paradis terrestre. Au contraire, la pomme est pour les Celtes un moyen de rester en contact avec l'Autre Monde. Soulignons que seules les créatures de l'Autre Monde pouvaient donner la pomme aux humains, jamais les druides.

Fruits du dieu de la nuit qui donne naissance au jour, les enfants vont récolter de porte en porte, le soir venu, des fruits, des noix, des noisettes et des bonbons.

Une des coutumes d'Halloween, surtout répandue au pays de Galles, consiste à attraper des pommes flottant sur l'eau avec les dents. Le lien est évident. L'eau représente l'élément de passage d'un monde à l'autre et aucune main humaine ne peut donner le fruit.

Nous pourrions poursuivre à l'envi la liste des coutumes d'Halloween dont les origines se perdent dans la nuit des temps. Toutes nous montreraient qu'elles constituent des traces diffuses de l'ancien “festival” de novembre. Elles s'en distinguent néanmoins par la rupture achevée des liens qu'elles entretenaient avec le monde des dieux.


Bibliographie
Françoise Le Roux et Christian-J Guyonvarc'h:
“La civilisation celtique”. Éditions Ouest-France, 1990;
“Les fêtes celtiques”. Éditions Ouest-France, 1995

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